Dans l’épure du jour et le murmure du vent,
Parmi les herbes communes baignées de rosée,
En silhouette sur les rouges du levant,
Une fleur étrange semble s’être apposée.
Rose sans épines, velours nimbé,
Carmins pétales sépales amers,
Par la fraîcheur de l’aurore enrobée,
La corolle d’un pistil trop vert.
Fière sur sa tige dans l’éclat du matin,
Son pollen poussière d’or elle abandonne,
Semis à la volée d’une invisible main,
Dans sa chevelure blonde qu’elle désordonne.
Teintes purpurines, reflets du soleil,
En sa tige s’écoule sa sève,
Calice de soie, robe de vermeil,
Dans la lueur du jour qui se lève.
Son mouvement semble une danse,
Dans l’immobile paysage,
Fleur qui oscille et qui balance,
Dans le silence de l’hommage.
Elle s’ouvre peu à peu à la lumière,
Dévoilant le secret de son âme,
Les mystères de sa chair trémière,
Arcanes d’une terrible femme.
Piège par ses fragrances subtiles,
Elle enivre par ses couleurs,
Prisme d’un arc en ciel futile,
Qui distille des odeurs.
Fausse princesse, cynique leurre,
Robe de soie, nectar venin,
Sourire mimétique trompeur,
Poison d’un morbide levain.
Sous la teinte coruscante du ciel,
Son contact déchire et vous blesse,
Âpre prurit et acide miel,
D’un bourgeon vampire des faiblesses.
En l’estompe grise du crépuscule,
Et des herbes assombries qui se touchent,
Là où le jour et la nuit s’articulent,
Une fleur vénéneuse se couche.