Il s’écoule le temps, en torrent accidenté,
A l’écume trompeuse et brouillonne,
Heurtant les berges de contrées hantées,
Où des pécheurs, les âmes s’étonnent.
Sinueux en sa mouvance insigne,
Torturé de remous et de vagues,
Il dessine sa route qu’il désigne,
Sur un horizon qu’il extravague.
Ombres et tumultes, il glisse,
D’une avance imperturbable,
Pâle surface étale et lisse,
D’un parcours irréméable.
D’une rive à l’autre il sinue,
Chaloupe lente en ses méandres,
Et dans les terres s’insinue,
N’ayant de cesse de s’y étendre.
Flâne usure de l’érosion,
Lambine caresse des âges,
Teintes d’une corrosion
Déposées sur les paysages.
Dénivelé des heures, douce pente,
S’écoule la vie en son temps,
En le lit d’un fleuve qui arpente,
L’intime relief des instants.
Rides ronds et ricochets,
Sur le flou de l’onde courante,
Simples desseins empêchés,
Par les surfaces apparentes.
Serpent du jour, anguille de la nuit,
Le temps allonge sa mouvance,
Fulgurances ou dolences de l’ennui,
Mol, il s’étire et nous devance.